Publié le 24.12.2020 par Barthélémy Gaillard
Jeudi 24 décembre, Bruxelles et Londres ont finalement trouvé un accord sur la nouvelle relation commerciale qui les liera après la sortie du Royaume-Uni du marché unique et de l’union douanière prévue le 31 décembre 2020. Il devrait d’abord être entériné provisoirement par le Conseil d’ici à la fin de l’année, avant d’être ratifié par le Parlement européen en février 2021.
David Frost, Boris Johnson, Ursula von der Leyen et Michel Barnier lors d’une rencontre à la Commission européenne, à Bruxelles, le 9 décembre 2020 – Crédits : Etienne Ansotte / Commission européenne
Après onze mois d’intenses négociations, d’atermoiements, et même de phases de découragement, jeudi 24 décembre, les équipes de négociation britannique et européenne ont finalement trouvé un compromis sur la nouvelle relation qui liera Londres et Bruxelles à partir du 1er janvier 2021. Le dernier obstacle, qui concernait l’accès des pêcheurs européens aux ressources halieutiques britanniques, a donc été levé. Le Royaume-Uni sort donc de l’union douanière et du marché unique, mais avec ce texte, les deux parties entérinent le principe de la levée des barrières douanières et des systèmes de quotas dans leurs échanges commerciaux. Un accord “utile“, selon les mots de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, qui s’est exprimée dans la journée, et qui “réjouit” Michel Barnier, négociateur en chef de l’Union européenne sur cet épineux dossier.
Quatre ans de processus
Un dossier épineux, dont l’issue a donc été longue à se dessiner, bouleversant au passage la vie politique britannique avec la succession de trois Premiers ministres : David Cameron, Theresa May et Boris Johnson. Suite au référendum du 23 juin 2016 actant une sortie de l’Union européenne par les citoyens britanniques (51,9% pour le “leave”), puis l’activation de l’article 50 par Theresa May en mars 2017, marquant l’ouverture des négociations de sortie, le Royaume-Uni était entré dans une période de transition. Un accord, signé en octobre 2019, avait établi que le pays quitterait officiellement l’Union européenne le 31 janvier 2020, mais resterait soumis aux règles du marché unique et de l’union douanière jusqu’au 31 décembre 2020. Cette période dite “de transition” touchait donc à sa fin, sans qu’aucun compromis ne soit trouvé jusqu’ici, ouvrant la porte à différents scénarios pour l’année 2021, notamment celui d’un no deal.
La concurrence et la pêche, les deux principaux obstacles
Les équipes de négociation européenne de Michel Barnier et britannique de David Frost, mais aussi Ursula von der Leyen et Boris Johnson, les dirigeants des deux parties, se sont réunis à de très nombreuses reprises dans l’espoir d’aplanir leurs différends. Dans la dernière ligne droite, deux sujets restaient à régler. L’Union européenne s’inquiétait tout d’abord qu’en sortant des règles européennes, le gouvernement britannique fixe des normes moins strictes à ses entreprises, autorisant du même coup des pratiques de dumping social, fiscal et écologique, au détriment de leurs rivales européennes. Sur ce sujet, la Commission européenne a affirmé que les deux parties s’étaient entendues pour maintenir un haut niveau commun de protection sociale, fiscale et environnementale.
Autre point de blocage qui a donc été également levé : la question des quotas de pêche accordés aux professionnels européens du secteur qui opèrent dans les eaux territoriales britanniques. Sur ce point éminemment politique, qui concerne principalement les pêcheurs français et danois, la Commission européenne a également assuré que les habitudes et la subsistance des communautés de pêcheurs européens qui officiaient dans les eaux britanniques ne seraient pas perturbées.
Quels changements dans la relation entre l’UE et le Royaume-Uni ?
Si le texte garantit la levée des barrières douanières et des systèmes de quotas dans les relations commerciales, il entérine également la sortie du Royaume-Uni de l’union douanière et du marché unique. Conséquence, le texte acte la fin de la libre circulation des biens, des services et des personnes, comme le rappelle ce document de la Commission européenne. Cela signifie par exemple que les citoyens britanniques devront faire une demande de visa pour s’installer, travailler ou encore étudier sur le territoire européen. Ou encore que les marchandises britanniques feront l’objet de contrôles douaniers avant d’être transportées et commercialisées sur le sol de l’UE.
Quelles sont les prochaines étapes ?
Ces points de blocage surmontés, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a jugé l’accord “juste, équilibré” et suffisant pour “protéger nos intérêts européens” à la fois sur la “garantie d’une concurrence loyale” et sur “la prévisibilité essentielle à nos communautés de pêcheurs“.
Pour qu’il entre en vigueur, il doit maintenant être ratifié par le Parlement européen. Son président, David Sassoli, a regretté que “la durée des négociations et le caractère de dernière minute de l’accord ne permettent pas un véritable contrôle parlementaire avant la fin de l’année.” Le Parlement européen avait en effet exigé que l’accord soit trouvé avant le 20 décembre, pour lui laisser le temps nécessaire pour se réunir en session plénière et pouvoir ratifier le texte avant la date butoir du 31 décembre. Il n’en a rien été.
L’accord post-Brexit est donc pour l’instant provisoire. Il devrait être validé par le Conseil à l’unanimité d’ici au 31 décembre, tandis que les eurodéputés le voteront en plénière au mois de février 2021, avance une source européenne. La fin de quatre ans et demi d’incertitude.