Souveraineté et Santé

Eric Campion

 Si l’Europe à travers les 27 n’est pas capable d’analyser les données de santé qu’elle génère, elle deviendra de facto dépendant de solutions extérieures, sans en avoir la maîtrise, ce qui pose le sujet de souveraineté. Les données médicales ne sont pas théoriquement aujourd’hui exportables. Chaque pays a donc la nécessité d’acquérir, de traiter et de stocker ses propres données pour éviter que des standards leur soient imposés par l’extérieur (notamment les équipementiers ou les GAFA s’agissant d’objets connectés liés au bien-être). L’indépendance numérique de l’Europe dans le domaine de la santé est donc un véritable enjeu

Donner du sens

L’Europe a une mission, faire en sorte que les citoyens européens soient des personnes libres dans une société libre et non sous tutelle des géants technologiques

Les technologies sont au service de la personne humaine et de la société et les règles de droit sont protectrices du projet de société souhaité qui porte nos valeurs affirme les repères et fait rayonner notre humanité européenne

Les progrès attendus des technologies d’intelligence artificielle, big data et robotique doivent profiter à tous et ne pas créer des fractures sociales, socio-économiques ou culturelles.

Les progrès issus de ces technologies, dans le dépistage, la connaissance fine des maladies et des risques de leur survenue, ne doivent pas altérer notre modèle solidaire de protection sociale, mais contribuer à réduire les inégalités et les risques d’exclusion

Tous acteurs du changement, le citoyen acteur

Les technologies doivent contribuer à améliorer les capacités des médecins et des équipes soignantes, à mieux comprendre et à soigner les maladies et épidémies, à soutenir le principe d’autonomie de la personne

Le débat sur l’impact des technologies d’intelligence artificielle et de la captation des données massives n’est pas une affaire d’experts, mais c’est l’affaire de tous.

L’ignorance est la première des choses à combattre car elle peut laisser la porte ouverte aux mar – chands d’illusions pseudo-techno-scientifiques auprès de personnes trop crédules.

Les usagers, les patients, les médecins et autres professionnels de santé ont à s’engager dans le monde des data et des algorithmes, sans appréhension paralysante ou véhémence dogmatique. C’est en participant eux-mêmes, et même conjointement, à la conception et l’élaboration d’objets et de dispositifs intelligents propres à répondre à leurs besoins qu’ils guideront utilement le secteur industriel plutôt que de laisser faire les lois du marché qui s’imposeraient à eux.

Cybersécurité

Les outils technologiques utilisés par les professionnels de santé et par les patients doivent être fiables, intuitifs, régulièrement actualisés par leurs promoteurs et les données qu’ils collectent et qu’ils traitent soient protégées de toute intrusion possible

 Les acteurs de santé (hôpitaux, médecins, chercheurs etc.) se doivent d’être sensibilisés à la valeur des données et à l’intérêt d’en conserver une forme de maîtrise collective et d’autre part d’être conscients que la qualité des données conditionne les résultats des traitements de big data. L’exploitation des données massives présente un intérêt majeur, tout particulièrement en matière de santé publique (ne pas en donner les clés à des sociétés non européennes)

La préservation du secret médical couvrant les données personnelles de santé doit être appliquée aux traitements des données massives et leur exploitation ne doit pas permettre l’identification d’une personne, au risque de conduire à des discriminations. La loi a établi des règles juridiques sur les autorisations d’accès aux bases publiques et au traitement des données qu’elles contiennent. Ces règles doivent être confortées par leur traduction dans le droit pénal avec des sanctions à hauteur de l’interdit fondateur d’intrusion dans la vie privée et dans un système d’information.

Jusqu’où les citoyens souhaitent ils protéger leurs données de santé, sont-elles considérées par eux comme un bien commun, notamment en matière de recherche, et alors dans quelles limites et à quelles conditions ?

Les infrastructures de données, plateformes de collecte et d’exploitation, constituent un enjeu majeur sur les plans scientifique, économique, et en matière de cybersécurité.

 La localisation de ces infrastructures et plateformes, leur fonctionnement, leurs finalités, leur régulation représentent un enjeu majeur de souveraineté afin que, demain l’Europe ne soit pas vassalisée par des géants supranationaux du numérique

Formation

Pour Le cursus de formation initiale et le développement professionnel continu, une simulation utilisant des moyens numériques interactifs doit être plus largement déployée, soit dans l’apprentissage de situations soit dans celui de la technicité d’un geste ou d’une investigation. L’Université en général et les facultés de médecine en particulier doivent intégrer des enseigne – ments au numérique en faisant largement appel à la transversalité des sciences mathématiques, physiques, informatiques, médicales et humaines (double cursus médical et ingénierie)

Aspect juridique

 Il va s’agir d’examiner le régime juridique des responsabilités : celle du médecin dans ses usages de l’aide à la décision et celle des concepteurs des algorithmes quant à la fiabilité des data utilisées et les modalités de leur traitement informatisé.

Les investissements

 La transformation numérique de la santé, des organisations, des métiers et des usages ne saura se réaliser sans les investissements numériques nécessaires

Il y a des « déserts médicaux » des « déserts de droits » des « Déserts numériques » par manque d’accès à Internet et au haut débit. (Les efforts, notamment financiers en matière d’équipement sont nécessaires )

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